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Coulisses d’une nouveauté
« Les pommettes rouges, c’est ma marque de fabrique ! »
Avec Marianne Barcilon, illustratrice de L’autre princesse
L’autre princesse est le cinquième album qui met en scène la princesse coquette et sa cousine Alice. Comment avez-vous abordé cette nouvelle histoire ?
Marianne Barcilon : Comme d’habitude, j’ai commencé à faire des croquis et à imaginer un découpage. Le plus drôle, c’est que j’avais l’impression de travailler dans le prêt-à-porter. C’est étrange de dessiner des petites filles en maillot de bain en plein milieu de l’hiver ! L’arrivée d’un troisième personnage est intéressante car cela permet de redistribuer les rôles. Éliette apparaît plus sympathique face à cette nouvelle petite princesse qui les prend de haut.
C’est facile de se renouveler quand un personnage devient un héros récurrent ?
M.B. : Même si j’avoue avoir un petit faible pour Nina – mon premier personnage chez Kaléidoscope –, je suis attachée à la princesse coquette. Je n’ai pas envie d’en faire quelqu’un de détestable, en poussant trop loin la caricature. Car des princesses coquettes, on en connaît tous ! Pour cette histoire, j’ai beaucoup travaillé les décors dans lesquels évoluent les personnages.
Une véritable complicité s’est nouée avec l’auteur Christine Naumann-Villemin. Comment travaillez-vous toutes les deux ?
M.B. : En fait, une forme de ping-pong à trois se met en place avec Isabel Finkenstaedt. L’histoire de l’album se construit dans une sorte de tricotage très intéressant. Je propose une maquette au crayon et un découpage. Isabel me fait des remarques pour renforcer tel ou tel aspect de la dramaturgie. Nous fonctionnons ainsi depuis le début. La première fois qu’on s’est rencontrées, j’étais un peu perdue. Elle m’a confié La tétine de Nina, écrit par Christine. Je me souviens qu’elle m’a lu le texte à haute voix. Cette première approche m’a été très précieuse. Grâce à ses intonations, j’ai commencé à comprendre sa vision des personnages et je me suis lancée.
La princesse coquette, Nina, Élinor… Vos héroïnes ont un lien de parenté graphique évidemment. Pourquoi cette idée de les dessiner avec des pommettes rouges ?
M.B. : La première petite fille que j’ai dessinée pour Kaléidoscope, c’était donc Nina. À vrai dire, mon fils, âgé alors de 2 ans et demi, avait la même bouille. Sans les nattes ! Quand j’ai imaginé d’autres personnages, je me suis aperçue que cette caractéristique physique revenait sous mon crayon. C’est devenu une marque de fabrique. Les enfants qui reproduisent mes personnages les font très souvent avec deux ronds rouges sur les joues : cela me fait très plaisir.
Vous vous rendez souvent dans des écoles. Que vous procurent ces rencontres avec vos jeunes lecteurs ?
M.B. : C’est très gratifiant. J’aime beaucoup animer ce genre d’atelier. Les enfants sont très heureux de s’approprier nos personnages. Ils sont aussi fiers de montrer ce dont ils sont capables et de recevoir un retour positif sur leurs propres dessins.
Coulisses d’une réédition
Les « Marcel » d’Anthony Browne
Pull jacquard sans manches, chemise boutonnée jusqu’au col, cravate ou nœud papillon, pantalon trop court laissant dépasser des chaussettes colorées, cheveux gominés avec raie au milieu, vous le reconnaissez ? Mais oui, c’est Marcel, le plus célèbre chimpanzé de la littérature jeunesse. Déjà plus de trente ans qu’il promène d’album en album sa silhouette légèrement voûtée et sa dégaine un peu gauche. Apparu en France en 1991, Marcel (Willy dans la version originale) est le héros le plus connu d’Anthony Browne, fidèle compagnon de route de Kaléidoscope. Le célèbre auteur britannique raconte que Marcel est né sous son crayon un peu par hasard alors qu’il réfléchissait à un personnage au cœur tendre, incapable de « faire de mal à une mouche » et inquiet « d’écraser les petits insectes quand il sortait se promener ». Un personnage un peu lunaire qui demande pardon au lampadaire après s’être cogné dedans!
Quand on lui demande de décrire Marcel, son « papa » reconnaît qu’il est « timide et sensible, mais il a une carapace dure ». On pourrait ajouter que ce chimpanzé introverti et maigrichon se révèle méticuleux, superstitieux, chanceux, rêveur, appliqué et persévérant. De Marcel la mauviette aux Histoires de Marcel en passant par Marcel le champion et les autres, les livres d’Anthony Browne distillent une petite musique teintée de nostalgie. Malgré les rebondissements souvent cocasses, il y est question de solitude, d’exclusion, de manque de confiance en soi, de situations un peu embarrassantes auxquelles on est tous confrontés, enfant comme adulte. Au final, Marcel finit toujours par dépasser les obstacles grâce à des moyens détournés et cloue le bec, à sa manière, aux plus costauds ou plus doués que lui.
Mai 2015